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Phạm-Duy Khiêm

Georges Pompidou

Léopold Sédar Senghor

Les Éditions de La Frémillerie

 

Les légendes des terres sereines est un recueil directement écrit en français où l’auteur réussit le tour de force de nous restituer des récits populaires vietnamiens, dont le plus connu auprès du public occidental, « L’arbalète surnaturelle », en restant fidèle au texte (dans la mesure où le permet une transmission surtout orale) et à l’esprit. Parfois même le sens caché du texte est explicité, discuté, mis en situation.

Seul le style de Phạm Duy Khiêm, un art du naturel, peut donner cet accès privilégié au fonds millénaire d’un peuple, des références spirituelles qui baignent encore aujourd’hui d’une façon quotidienne la vie des Vietna­miens.

Une opportunité unique de mieux connaître ce pays et ses racines, à nouveau disponible.

 

EXTRAIT

LE TAILLEUR ET LE MANDARIN

 

 

C'était le tailleur le plus renommé de la capitale pour son adresse. Tout habit sorti de ses mains allait parfaitement au client, quels que fussent sa taille, sa corpulence, son âge et sa démarche.

Un jour, un mandarin le fit appeler pour lui commander une robe de cérémonie.

Après avoir pris les mesures, le tailleur demanda respectueusement au mandarin depuis combien de temps il était en fonctions.

« Quel rapport cela peut-il avoir avec la coupe de ma robe ? dit le mandarin avec humeur.

- Le rapport le plus étroit, Seigneur, répondit le tailleur. Vous savez qu'un mandarin promu de fraîche date, tout pénétré de son importance, porte la tête haute et la poitrine bombée. Nous devons en tenir compte et couper le pan de derrière plus court que celui de devant.

« Plus tard, nous diminuons peu à peu l'inégalité des pans, qui deviennent de même longueur quand le mandarin atteint le milieu de sa carrière.

« Enfin, lorsque, courbé sous la fatigue de ses longs services aussi bien que sous le poids des années, il n'aspire plus qu'à rejoindre ses ancêtres au ciel, la robe doit être plus longue derrière que devant.

« Voilà pourquoi un tailleur qui ne connait pas l'ancienneté des mandarins ne saurait les habiller convenablement.»

192 pages

Format 14x19 cm

Prix public 16 €

ISBN : 9782359071047

 

LF

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Phạm-Duy Khiêm

La littérature vietnamienne d’expression française à la recherche de sa double vocation nationaliste et universaliste

 

Les accords de Genève de 1954 coupèrent le Vietnam en deux États au niveau du 17e parallèle. Ce douloureux partage a néanmoins l’avantage pour les nationalistes vietnamiens de se constituer en une communauté plus cohérente dans le Sud-Vietnam, devenu République du Vietnam, désormais libérée de la tutelle française.

Le français continue à occuper une place de choix comme instrument de progrès et moyen d’expression littéraire, venant en seconde place après la langue vietnamienne. A part quelques exceptions, depuis 1954, les écrivains vietnamiens d’expression française écrivent aussi en vietnamien, et ce bilinguisme littéraire est un fait des plus encourageants pour le développement de la littérature et de la pensée vietnamiennes.

Parmi les écrivains uniquement d’expression française, citons Phạm-Duy Khiêm et Phạm Van Ký qui suivent le chemin de l’universalisme délibérément choisi. Phạm-Duy Khiêm a choisi le français pour dire le plus authentique et le plus douloureux de lui-même dans son ouvrage Nam et Sylvie publié en 1957 sous le pseudonyme de Nam-Kim et couronné du Prix Louis Barthou de l’Académie Française. De son côté, Phạm Van Ký étend l’humanisme d’un Phạm-Duy Khiêm à l’échelle internationale avec son roman Perdre la demeure publié en 1961, couronné au Grand Prix du Roman de l’Académie Française.

 

             Tiré d’une étude de Bùi Xuân Bào in Littératures de langue française hors de France, parue en 1976